Message de la Maison universelle de justice pour marquer le bicentenaire de la naissance du Báb
À tous ceux qui sont venus honorer le Héraut d’un nouveau jour
Amis chèrement aimés,
Réfléchissez avec nous. Chaque fois qu’un Éducateur divin se manifeste dans le monde, une Figure dont les enseignements en viendront à modeler la pensée et l’action humaines des siècles durant – à une époque si marquante et si cataclysmique, à quoi devrions-nous nous attendre ?
L’avènement de chaque Éducateur divin, comme en font mention les textes sacrés des grandes religions du monde, est un événement crucial qui accélère le progrès de la civilisation. L’impulsion spirituelle que chacun d’entre eux a fournie tout au long de l’histoire a permis d’étendre le rayon de la coopération humaine du clan à la tribu, à la ville-État et à la nation. Chacun de ces grands Enseignants a promis que, le moment venu, apparaîtrait une autre Figure divine dont l’avènement serait attendu et dont l’influence réformerait le monde. Il n’est donc pas étonnant que la venue du Báb, dont nous honorons aujourd’hui le deux centième anniversaire de la naissance, ait provoqué une agitation sans précédent dans le pays où il est né. Le moment de son apparition, comme celui de la venue de toutes ces Figures, a précipité la libération de puissantes forces spirituelles – mais aucun événement spectaculaire n’y a été associé. Au lieu de cela, une conversation s’est engagée, tard le soir, dans une modeste demeure persane, entre un étudiant en religion et son jeune hôte, durant laquelle ce dernier révéla qu’il était le Promis, l’Éducateur divin que son invité cherchait. « Observez attentivement », remarqua-t-il. « La personne à laquelle […] [il] a [été] fait allusion pourrait-elle être une autre que moi ? » C’est ce jeune homme, le Báb, que nous saluons comme Celui dont la venue – après un intervalle de mille ans – a une fois de plus diffusé la lumière de la direction divine sur l’humanité.
De ce premier instant a découlé tout ce qui est advenu depuis. Les Écrits du Báb ont coulé abondamment de sa plume, révélant de profondes vérités, rejetant les superstitions qui prévalaient en son temps, exhortant le peuple à reconnaître l’importance de l’époque, fustigeant l’hypocrisie de ses dirigeants et appelant le monde à une norme de conduite élevée. « Ô peuples de la terre ! » – déclare-t-il dans l’une de ses principales œuvres – « En vérité, la resplendissante Lumière de Dieu est apparue parmi vous […] afin que vous puissiez être guidés vers les voies de la paix et, avec la permission de Dieu, que vous sortiez de la nuit vers la lumière sur ce long chemin de vérité… » Son influence s’est répandue avec une rapidité extraordinaire, débordant les frontières de la Perse. Les observateurs furent également stupéfaits par la croissance rapide du nombre de ses disciples et par leurs actions d’un courage et d’une dévotion inégalés. Des récits de la vie du Báb – le cours rapide qu’elle a suivi et le drame tragique qui y a mis fin – ont incité des âmes curieuses à se rendre en Perse et à poursuivre leur recherche, et ont inspiré un éventail d’hommages artistiques à sa Personne.
L’éclat de la lumière du Báb semble plus éblouissant encore quand il a pour toile de fond l’obscurité du milieu social dans lequel il est apparu. La Perse du dix-neuvième siècle était bien loin de ses heures de gloire, alors que sa civilisation faisait l’envie du monde. L’ignorance y régnait alors; des dogmes insensés n’étaient pas contestés; les inégalités étaient aggravées par une corruption endémique. La religion, le fondement de l’ancienne prospérité de la Perse, était devenue un corps dénué de l’esprit qui l’avait animé. Chaque année qui passait n’apportait que désillusion et désespoir aux masses assujetties. L’oppression était totale. Puis, tel un orage printanier, le Báb est venu nettoyer et purifier, déraciner les coutumes surannées et dépassées d’un âge dévoyé et laver la poussière qui brouillait la vue de ceux qui avaient été aveuglés par l’illusion. Mais le Báb avait un objectif particulier en vue. Il cherchait à préparer le monde à la venue imminente de Bahá’u’lláh – le second des Astres jumeaux destinés à apporter une lumière nouvelle à l’humanité. C’était son thème le plus récurrent. « Lorsque l’Étoile du matin de Bahá brillera, resplendissante, au-dessus de l’horizon d’éternité, » enjoignit-il à ses disciples, « il vous incombe de vous présenter devant son trône. »
C’est ainsi que le Báb, et Bahá’u’lláh avec une splendeur plus grande encore, ont illuminé une société et une époque enveloppées dans les ténèbres. Ils ont inauguré une nouvelle étape dans l’évolution sociale : l’étape de l’unification de toute la famille humaine. Les énergies spirituelles qu’ils ont libérées dans le monde ont insufflé dans chaque domaine d’activité une vie nouvelle dont les résultats sont perceptibles dans la transformation qui s’est produite. La civilisation matérielle a énormément progressé ; des découvertes stupéfiantes ont été réalisées en science et en technologie ; les portes des connaissances accumulées de l’humanité ont été grandes ouvertes. Et les principes énoncés par Bahá’u’lláh pour ennoblir et faire progresser la société et pour mettre fin aux systèmes de domination et d’exclusion sont aujourd’hui largement acceptés. Songez à son enseignement selon lequel le genre humain ne forme qu’un seul peuple, ou que les femmes sont égales aux hommes, ou que l’éducation doit être universelle, ou que la recherche rationnelle de la vérité doit prévaloir sur les théories fantaisistes et les préjugés. Dans tous les pays, une grande partie de la population du monde est aujourd’hui d’accord avec ces valeurs fondamentales.
Toutefois, des arguments contre ces valeurs, bien qu’autrefois relégués à la marge de la pensée réfléchie, resurgissent dans la société – rappelant que les idéaux ont besoin de la force d’un engagement spirituel pour être consolidés. Reconnaître quelque chose par principe est une chose; y adhérer de tout son cœur en est une autre, et il est encore plus difficile de refaire la société de manière à l’exprimer d’une manière collective. C’est pourtant le but de communautés à travers le monde qui prennent modèle sur les enseignements de Bahá’u’lláh. Ces communautés s’efforcent de concentrer la lumière de ces enseignements sur les problèmes chroniques qui affligent les sociétés dans lesquelles elles vivent ; elles élaborent des programmes d’action concrète centrés sur des préceptes spirituels. Ces communautés promeuvent l’éducation des filles et des garçons en toutes circonstances ; adhèrent à une conception élargie de l’adoration qui inclut le travail effectué dans un esprit de service ; considèrent les aspirations spirituelles, plutôt que l’intérêt personnel, comme des sources intarissables de motivation ; et inculquent une volonté de favoriser la transformation individuelle et sociale. Elles aspirent à susciter simultanément un progrès spirituel, social et matériel. Par-dessus tout, ces communautés se définissent par leur dévouement à l’unité de l’humanité. Elles chérissent la riche diversité que représentent tous les peuples du monde, tout en maintenant que notre identité en tant que membres du genre humain passe avant d’autres identités et associations. Elles affirment la nécessité d’une conscience planétaire, née d’une préoccupation commune pour le bien-être de l’humanité, et elles considèrent tous les peuples de la terre comme leurs frères et sœurs spirituels. Ne se contentant pas d’appartenir à de telles communautés, les disciples de Bahá’u’lláh s’efforcent constamment d’inviter des âmes animées par des préoccupations semblables aux leurs à se joindre à eux pour apprendre à mettre ses enseignements en pratique.
Nous arrivons au cœur de notre propos. Il s’agit d’une question difficile, et elle requiert de la franchise. Il existe de nombreuses causes nobles et admirables dans le monde, et elles découlent de perspectives particulières, chacune ayant son propre mérite. La cause de Bahá’u’lláh est-elle simplement l’une d’entre elles ? Ou est-elle universelle, incarnant les plus hauts idéaux de toute l’humanité ? Après tout, une Cause destinée à devenir la source de justice et de paix durables – non pas pour un lieu ou un peuple en particulier, mais pour tous les lieux et tous les peuples – doit être inexhaustible, elle doit posséder une vitalité céleste qui lui permette de transcender toutes les limites et d’englober toutes les dimensions de la vie de l’humanité. En définitive, elle doit avoir le pouvoir de transformer le cœur humain. Alors, à l’instar de l’invité du Báb, observons attentivement. La cause de Bahá’u’lláh ne possède-t-elle pas ces qualités mêmes ?
Si les enseignements apportés par Bahá’u’lláh sont ce qui permettra à l’humanité de progresser vers les plus hauts niveaux d’unité, alors il nous faut sonder notre âme pour trouver la bonne réponse. La multitude qui a reconnu le Báb a été exhortée à l’héroïsme, et sa remarquable réponse est consignée dans l’histoire. Que tous ceux qui sont conscients de l’état du monde, et des maux tenaces qui déforment la vie de ses habitants, entendent l’appel de Bahá’u’lláh à servir avec abnégation et loyauté – l’héroïsme de l’époque actuelle. Quoi d’autre pourra sauver le monde, sinon les efforts d’innombrables âmes qui font du bien-être de l’humanité leur principale, leur première préoccupation ?
La Maison universelle de justice